Hubert est parti effectuer un programme d’une année scolaire en Autriche (2015-2016) via l’association AFS Île-de-France. Rentré depuis plusieurs mois en France, il nous raconte son expérience d’immersion culturelle.

 

Pourquoi avoir choisi ce pays ?
Ma famille est germanophile. Moi un peu moins car la langue me posait problème. Malgré plusieurs années passées en colonie de vacances avec des Allemands, que j’adorais, je n’avais pas réussi à m’en empreindre. Je savais que jamais je n’aurais pu apprendre l’allemand sans le vivre au quotidien. Alors quand AFS Autriche, après le refus de mon dossier par AFS Allemagne, s’est engagé à me trouver une famille qui me correspondait, j’ai sauté sur l’occasion !

Quelle idée de ce pays te faisais-tu avant de partir, et quelle idée en as-tu aujourd’hui ?
Pour moi, l’Autriche était comme une petite sœur de l’Allemagne qu’on connaît finalement assez peu. C’est d’ailleurs ce qui m’a poussé à dire oui à l’Autriche quand l’occasion s’est présentée. J’ai eu un peu de mal à convaincre mes amis que « si si, l’Autriche, c’est exotique ! ». Ils se sont moqué de moi au début. Mais l’Europe Centrale et l’Autriche sont très largement méconnues des Français. Preuve en est l’idée que je m’en faisais avant, qui est complètement fausse, et qui d’ailleurs hérisserait les poils d’un Autrichien ! Car c’est un pays fier et faussement auto-dépréciateur, un peu comme la France d’ailleurs, mais dont les habitants sont d’une camaraderie sans borne une fois que la glace est rompue. Ils ont un dédain tout particulier pour « leur grande sœur l’Allemagne », qui n’en est d’ailleurs pas une et qui lui rend bien. Ils éprouvent toujours une vague nostalgie du vaste empire qu’ils étaient autrefois. Toutefois, malgré un retour au traditionalisme chez une partie de la population, l’Autriche a su jongler entre le maintien d’une identité qui lui est chère, et une tolérance qui lui est propre. D’ailleurs, dans mon lycée (qui était en fait un bateau sur le Danube), personne n’avait deux générations d’Autrichiens natifs derrière lui, fruit de l’héritage d’un empire austro-hongrois multi-ethnique et fier de l’être. Les Autrichiens sont beaucoup moins froids et rigoureux que ce que l’on pourrait bien croire, et ils ont un fort tempérament festif, une fois le travail abattu ! À Vienne, la culture est omniprésente, autant que l’histoire, et les gens sont aussi intéressants qu’intéressés par une nouvelle rencontre. Sans pollution, puanteur, bruit, problèmes de transports ou sentiment d’insécurité : Vienne, c’est un peu un Paris auquel on aurait enlevé tous les défauts.

Quelles ont été tes premières difficultés à ton arrivée dans le pays ?
La première des difficultés rencontrées, cela a été la pratique de la langue allemande toute la journée en classe, et pas qu’en classe d’ailleurs. Les autrichiens parlant un anglais très correct, je m’y suis pris un peu tard. J’ai dû aussi m’habituer aux habitudes de la famille, notamment le dîner que l’on prenait quasiment toujours chacun de son côté. Me faire des amis ne fut pas un problème, mais les garder est autre chose. Une vraie amitié autrichienne se mérite en quelque sorte, en tout cas, c’est l’impression que j’en ai eue. La dernière chose avec laquelle j’ai eu le plus de mal fut le réveil au matin, et l’odeur de la nourriture que ma mère d’accueil donnait à ses huit chats.

Moi avec Paolo, mon meilleur ami viennois.

Comment as-tu surmonté ces difficultés ?
En m’adaptant ! Parfois, bien trop lentement, en laissant des problèmes s’envenimer, ce qui est à proscrire. Poser le maximum de questions ne m’a pas forcément évité de faire des efforts, mais cela m’a permis de prendre moins de murs.

Quels conseils donnerais-tu à un candidat au départ aujourd’hui ?
Je lui dirais qu’il ne s’attende pas à vivre les moments les plus faciles, seulement les plus beaux.

Quelles différences culturelles t’ont le plus marquée ?
Les autrichiens sont moins constamment en train de se vanner méchamment comme des Français. Ils se respectent bien plus. En outre, les gens ne se coupent pas la parole à tout bout de champ (comme des Français…), cela étant peut-être dû au fait qu’en allemand, le verbe est à la fin de la phrase. Le mode de vie est à peu près le même dans la capitale, à quelques détails près.

En quoi le système scolaire est-il différent en Autriche comparé au système scolaire français ?
Les cours se terminent à 13h30, et jamais un cours ne dure plus de 45min ! Les professeurs sont moins stricts et sévères avec les élèves, qui le leur rendent bien. Une vraie relation de respect mutuel est établie entre tous les élèves et l’ensemble du corps professoral. Tant et si bien que quasiment aucun élève ne décroche complètement. Il existe comme une espèce de culte de la seconde chance. Cependant, les élèves ont quasiment un an d’avance sur nous, toutes matières confondues.

Comment s’est passé ton séjour dans ta famille d’accueil ?
J’ai eu un frère d’accueil aussi exubérant que moi, avec qui j’entretenais une relation quasi fraternelle. Mais il est parti au bout de cinq mois pour un programme AFS au Japon, ce qui me laissa seul avec ma mère d’accueil les quatre mois restants. Cela s’est globalement bien passé. Ma mère d’accueil fut un torrent de gentillesse.

Avec ma classe et mes amis du lycée dont Jan, mon frère d’accueil (celui qui est très bouclé).

Qu’est-ce que ton expérience t’a apporté personnellement ?
Cette expérience m’a apporté beaucoup de remises en questions, et une ouverture d’esprit qui me permet de m’entendre avec quiconque. Désormais, je suis habité par une envie insoutenable de partir explorer les quatre coins du monde. Cette expérience m’a aussi permis de canaliser mes ardeurs adolescentes pour les rendre plus productives, tout en tenant compte des autres et pas seulement de moi-même. Bref, du changement et de merveilleux souvenirs !

Penses-tu que cette expérience aura une influence sur ton parcours universitaire, voire professionnel ?
Une influence tellement grande que j’y retourne dès cet été chez un ami pour préparer l’examen international B2 afin de pouvoir rentrer à la fac de Vienne après mon bac ! Mais qu’importe le parcours que je ferai, celui que j’ai déjà fait me donnera et me donne déjà des points en plus. Je le vois dans l’œil des adultes qui me posent des questions : un savant mélange de curiosité et de respect.

Quels sont les plus beaux souvenirs de ton séjour ?
J’en ai trop !

Comment s’est déroulé ton retour en France dans ta famille et avec tes amis ?
Mes parents m’ont mis en sas de décompression pendant deux semaines en Ardèche, quasiment à la descente de l’avion, avec trois amis ! Je n’avais jamais pensé détenir autant de larmes dans mon seul corps… On m’a dit que j’étais devenu plus mature, plus calme, plus posé. Mes anciens vrais amis sont revenus, les autres se sont souvenus de moi quand même, mais ce n’étaient pas eux qui m’avaient manqué. Puis, le temps est passé, et l’impression d’engourdissement des sens, comme au sortir d’un rêve, fut emportée par les frissons d’une nouvelle vie, ici, en France. Je reste en contact avec mes amis d’Autriche et j’en ai déjà revus trois en six mois !

Comment s’est déroulé ton retour en France au niveau des études ?
Je suis parti effectuer mon année scolaire en Autriche entre la Seconde et la Première, et j’avais été accepté dans mon nouveau lycée un jour avant mon départ ! Ce qui m’a soulagé pour l’année. J’ai rencontré à nouveau son proviseur dix mois plus tard, le lendemain de mon atterrissage à Paris. Il m’a donné des révisions afin que je ne sois pas trop largué en Première. Là, j’ai un bon bulletin, et je cartonne en langues ! Je suis donc arrivé dans un nouvel établissement, compréhensif mais exigeant. Nouveaux amis, nouveaux profs, mais au fond rien de nouveau pour moi qui ai pris goût au changement ! J’ai donc dû me remettre dans le rythme régulier des études, comme après de longues vacances d’été. Mais j’ai l’impression que les thématiques abordées dans mon lycée, notamment en sciences politiques, résonnent en moi différemment qu’avec les autres élèves. Je suis convaincu que cette année passée en Autriche a été pour moi une opportunité de vivre une expérience inoubliable, et si singulière. Il n’en existe pas deux similaires.